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14 mai 2025
De l’importance de maintenir notre engagement

Dans notre monde interconnecté, le progrès, l’innovation et la culture transcendent les frontières – tout comme les crises. A mesure que les conflits se propagent, les solutions nationales seules s’avèrent insuffisantes. Dans des régions complexes comme le Sahel, la montée des régimes militaires et du sentiment anti-occidental ont poussé un certain nombre d’acteurs européens à se retirer, doutant de leur capacité à avoir un impact positif et durable sur le développement. Pourtant, un désengagement risque encore d’aggraver l’instabilité.
Naviguer à travers les changements de cap géopolitiques
Les agences européennes actives dans des régions comme le Sahel font face à une évolution majeure des courants géopolitiques. Elles doivent se frayer un chemin dans les priorités politiques de leur gouvernement national, tout en gardant le cap et en atteignant leurs objectifs de coopération. Même en l’absence d’une position commune de l’UE sur la question, ces agences jouent un rôle crucial dans le soutien aux pays en état de fragilité, contribuant à leur résilience et, par extension, à la stabilité de l’Europe elle-même.
Le travail des agences de coopération internationale profite à la fois aux citoyen·nes européen·nes et aux habitant·es des pays partenaires : leurs activités couvrent des domaines essentiels, tels que la migration, la sécurité, l’énergie et la transition environnementale – des thématiques au cœur de la politique de l’UE. S’efforcer d’obtenir des résultats en matière de migration ou de sécurité, par exemple, sans traiter les causes sous-jacentes de l’instabilité, ne sera pas seulement inefficace, mais pourrait s’avérer contreproductif.
Moins de concurrence, plus de coopération
En travaillant pour réduire les inégalités, promouvoir la stabilité et renforcer la gouvernance, des organisations telles qu’Enabel disposent d’une grande expertise dans les régions touchées par des crises. Quelque 72 % des projets d’Enabel opèrent dans des environnements fragiles, en se concentrant sur la prévention des crises et la résilience face aux défis environnementaux et sociaux. Notre expérience conjointe confirme le caractère crucial de la coopération dans ces régions en termes de sécurité et de prospérité mondiales.
En parallèle, nous devons repenser notre engagement. Concevoir des programmes qui contribuent à la consolidation de la paix, en renforçant la collaboration entre organisations et en adoptant des approches locales. Approfondir les partenariats avec les autorités locales, la société civile et divers groupes d’intérêt (jeunes, femmes, communautés de la diaspora), qui jouent un rôle central en apportant leurs connaissances locales, leur confiance et leur crédibilité à notre travail.
Une vision intégrée de la paix et de la sécurité
Dans notre démarche pour rester pertinents, nous devons également reconnaître le lien intrinsèque entre coopération et défense. Mettre davantage en commun nos ressources et coordonner les actions entre les secteurs de la coopération et de la défense nous permettra d’avoir un impact plus significatif, tant à l’intérieur qu’à l’extérieur de nos frontières.
Ainsi, au Burkina Faso, où la crise sécuritaire prolongée affecte de nombreux aspects de la vie, plus d’un million d’enfants étaient déplacés internes en 2024, et au moins 6.000 écoles étaient fermées. Pourtant, investir dans l’éducation reste essentiel pour doter toute une génération d’enfants et de jeunes burkinabés des compétences nécessaires à la construction d’un avenir prospère et pacifique.
Les partenaires locaux – autorités éducatives régionales et provinciales, structures communautaires, enseignant·es – s’avèrent dès lors cruciaux pour garantir la continuité de l’éducation. Grâce à leur soutien et à leur expertise, les enfants déscolarisés ont bénéficié de cours de rattrapage ; quant aux étudiant·es et enseignant·es touché·es par le conflit, ils et elles ont reçu un soutien psychosocial. Dans les zones où les écoles restent fermées, un programme d’éducation par radio a permis à plus de 10.000 enfants de poursuivre leur scolarité.
L’identité légale représente un autre défi. En 2020, au Burkina Faso, moins de la moitié de la population a enregistré des actes d’état civil, ce qui entrave sérieusement l’accès aux droits fondamentaux, en particulier pour les personnes déplacées à l’intérieur du pays. Enabel s’est associée à la Direction générale de la modernisation de l’état civil, aux tribunaux départementaux, aux municipalités et à des ONG comme Children Believe pour moderniser et numériser les registres d’état civil. Cette initiative a permis de délivrer des certificats de naissance à plus de 10.000 enfants, les protégeant ainsi du risque d’apatridie et garantissant leur accès à des services essentiels comme les soins de santé et l’éducation.
L’engagement de la Belgique en faveur de la gouvernance et de la stabilité dans la région du Sahel implique également des approches régionales, comme l’illustre le portefeuille climatique que nous mettons en œuvre au Niger, au Mali, au Sénégal et au Burkina Faso.
Si nos activités ne peuvent à elles seules rétablir la paix, elles constituent un élément essentiel de la stabilité à long terme. Des progrès et une paix durables nécessitent des investissements stratégiques pérennes dans la prévention des crises, la justice sociale et économique, et le renforcement de la résilience. Plus qu’un investissement dans des pays individuels, il s’agit d’un investissement pour la paix mondiale.