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14 mai 2025
Un partenariat à des fins d’impact : l’engagement de la Fondation Gates et d’Enabel en faveur de systèmes de santé résilients
Interview

Le paludisme demeurant un problème de santé mondial majeur, la Fondation Gates et Enabel collaborent à l’accélération des progrès accomplis sur la voie de son éradication. Gargee Ghosh, Présidente ‘Global Policy & Advocacy’ à la Fondation Gates, explique comment cette collaboration renforce les systèmes de santé tout en donnant la part belle à des solutions innovantes.
Pourquoi la Fondation Gates a-t-elle décidé de s’associer à Enabel dans la lutte pour l’éradication du paludisme ?
La Fondation Gates s’est engagée à accélérer la découverte et le développement d’outils vitaux pour améliorer la santé et réduire la charge de morbidité à travers le monde. Nous concentrons cet engagement sur des domaines où la charge, la négligence et le potentiel d’impact sont élevés, en particulier dans les pays en développement. Notre travail se fonde sur la conviction que toutes les personnes, en particulier celles qui vivent dans des communautés défavorisées dans le monde entier, devraient pouvoir mener une vie saine et productive. Nous effectuons ce travail avec des partenaires aux quatre coins du monde ; nous avions d’ailleurs déjà collaboré avec le gouvernement belge à l’élimination de la trypanosomiase en République démocratique du Congo. Ce partenariat ayant débouché sur une conversation visant à explorer une collaboration plus poussée, nous y avons vu l’opportunité d’associer les efforts du gouvernement belge et d’Enabel en matière de renforcement des systèmes de santé aux nôtres déployés dans la lutte contre le paludisme.
L’éradication du paludisme exige des systèmes de santé robustes pour garantir l’accès à des soins de qualité. De même, le renforcement des systèmes de santé peut tirer parti de la lutte contre le paludisme, qui permet de réduire la charge pesant sur les infrastructures de santé. Dans certaines régions, plus de 50 % des consultations médicales le sont pour cause de paludisme. En raison de son empreinte géographique, de son expertise sur le terrain et de ses solides relations avec les gouvernements partenaires, Enabel s’est dès lors avérée un partenaire intéressant pour notre Fondation.
Pouvez-vous nous donner un aperçu des principales réalisations de notre partenariat au Niger et au Burundi ? De votre point de vue, quelles ont été les activités qui ont eu le plus grand impact ?
Le renforcement des systèmes prenant du temps, il est encore tôt pour appréhender le plein impact de notre partenariat. Les effets sur le paludisme deviendront plus évidents une fois le programme pleinement opérationnel. Il n’en demeure pas moins que nous assistons déjà à des progrès considérables dans les feuilles de route nationales relatives aux demandes de financement du Fonds mondial de lutte contre le VIH, la tuberculose et le paludisme, pour lesquelles Enabel apporte son appui au programme de lutte contre le paludisme. En outre, une collaboration passionnante a vu le jour entre Enabel et Audere dans le domaine de la santé numérique ; quant au partenariat conclu entre Enabel et Blue Square sur la surveillance du paludisme, il est lui aussi très prometteur.
Quel rôle est selon vous dévolu à Enabel en complément des priorités de la Fondation Gates en matière d’éradication du paludisme ?
L’expertise d’Enabel et sa présence dans les pays concernés sont inestimables pour consolider les systèmes de santé, en collaboration avec les gouvernements des pays où le paludisme est endémique et en les soutenant dans cette démarche. Il s’agit d’un volet essentiel des efforts d’éradication plus larges et à long terme. La capacité opérationnelle d’Enabel, son expertise locale et l’engagement des parties prenantes complètent les priorités de la Fondation en garantissant que les projets sont adaptés au contexte et mis en œuvre de manière efficace.
Notre partenariat actuel comprend également la participation de Bluesquare, une société belge spécialisée dans les systèmes d’information sanitaire innovants, dans l’optique de renforcer la surveillance du paludisme. Quelle sera selon vous l’évolution du rôle des partenariats public-privé dans le secteur du développement international ?
Le secteur privé est un acteur majeur de la santé et du développement à travers le monde, ses divers partenaires offrant une expertise spécifique et encourageant l’innovation. Le travail de Bluesquare en matière de gestion, d’intégration et de visualisation des données, combiné à ses approches novatrices de la collecte de données à partir de campagnes et de systèmes de routine, en est un excellent exemple. Les partenariats public-privé nous permettent de tirer parti des forces des deux secteurs, sur la base de valeurs communes, en favorisant l’innovation, l’efficience et la durabilité des efforts de développement international.
Ces partenariats s’avèrent de plus en plus importants au cœur d’un paysage du développement en pleine évolution. En effet, les secteurs public et philanthropique sont en mesure de réduire les risques des projets et des investissements afin d’encourager l’engagement du secteur privé dans des contextes à faible revenu qui auraient pu être perçus auparavant comme trop risqués.
Quel rôle la philanthropie et des organisations comme la Fondation Gates jouent-elles dans la promotion de politiques d’égalité de genre fondées sur des données probantes ?
Le changement systémique exige que de nombreuses personnes de travaillent ensemble et mettent en commun leurs ressources et leur expertise afin de relever les défis les plus urgents en matière de santé et de développement, y compris les inégalités de genre. Nous savons que ces inégalités freinent non seulement les femmes et les filles, mais aussi les hommes et les garçons, en étouffant dans l’œuf tout progrès et toute croissance économique. La philanthropie est particulièrement bien placée pour faire progresser l’égalité de genre en finançant des domaines sous-financés comme la collecte de données, en fournissant un capital catalytique et en prenant des risques que le secteur privé ou le gouvernement ne seraient pas en mesure d’assumer.
La Fondation Gates se concentre actuellement sur l’investissement dans les femmes et les filles dans les domaines qui génèrent les meilleurs rendements et font progresser l’égalité de genre, à savoir : l’accès au capital, l’élargissement des options de soins pour les parents qui travaillent et l’appui à la santé des femmes, y compris au moyen de l’accès aux moyens contraceptifs. Nous jouons un rôle de catalyseur, en partenariat avec les gouvernements, les organisations multilatérales et le secteur privé, afin de découvrir ce qui fonctionne et de le transposer à plus grande échelle. Notre ambition en faisant progresser les politiques fondées sur des données probantes est d’induire un changement durable et systémique qui promeut l’égalité de genre.
La Fondation Gates est à l’avant-garde des initiatives en matière de santé mondiale. En quoi, à vos yeux, se démarque votre approche ? Comment la vision et l’engagement de la Fondation en faveur de l’éradication du paludisme exercent-ils une influence sur les efforts mondiaux et les partenariats comme le nôtre ?
L’approche adoptée par la Fondation Gates vis-à-vis des initiatives en matière de santé mondiale repose sur des données probantes, la collaboration et des solutions axées sur l’impact. Ce qui nous distingue vraiment, c’est notre engagement inébranlable à relever certains des défis sanitaires les plus complexes au monde, comme le paludisme, grâce à l’innovation et au partenariat.
Nous sommes également mus par la conviction que chaque vie a une valeur égale et que la survie ne devrait pas dépendre de l’endroit où l’on naît. L’éradication du paludisme est une question d’équité. La moitié du monde a déjà éliminé le paludisme et plusieurs régions sont sur le point de le faire (Europe, Amérique centrale, Grand Mékong). Il serait dès lors tout à fait inéquitable d’affirmer que nous ne devrions pas éliminer cette maladie dans le reste du monde. Nous espérons que des partenariats comme le nôtre inspireront d’autres acteurs à nous rejoindre dans cette mission.
Quels pourraient être les futurs domaines de collaboration potentiels entre nos deux organisations ?
Nous espérons pouvoir étendre notre collaboration sur le paludisme, poursuivre notre partenariat de longue date sur la trypanosomiase, élargir notre lutte contre d’autres maladies infectieuses et œuvrer de concert dans l’optique de garantir un accès équitable à des produits de santé de qualité. Ensemble, nous pouvons tirer parti de notre expertise et de nos ressources combinées pour atteindre un impact plus considérable qu’en travaillant de façon isolée.