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14 mai 2025
Lutte contre la désertification : solutions locales, impact régional

Depuis mai 2022, Enabel déploie un ambitieux programme climatique régional au Sahel, couvrant le Burkina Faso, le Niger, le Mali et le Sénégal. Confrontée à une désertification croissante et à des sécheresses prolongées, cette région voit son équilibre écologique et socio-économique menacé.
Face à ces défis, l’initiative d’Enabel vise à restaurer 10.000 hectares de terres dégradées par pays – soit 40.000 hectares au total – tout en impliquant activement les communautés locales pour assurer une gestion durable des ressources naturelles.
Les communautés au cœur de la restauration écologique
Toute action durable commence par une concertation locale. Ainsi, les actions en cours sont précédées de dialogues avec les communautés locales des régions d’action. Ces réunions permettent d’identifier les ressources, infrastructures hydrauliques et terres à restaurer, tout en définissant les usages futurs des sites réhabilités : agriculture, pastoralisme ou préservation de la biodiversité.
En effet, la gestion des ressources naturelles peut être une source de conflits. Restaurer des terres ne se limite donc pas à un enjeu écologique : il est indispensable de déterminer ensemble leur vocation, et qui pourra en jouir. Sans cette concertation, le risque est de créer de nouvelles tensions au lieu d’apporter des solutions durables.
Ces discussions ouvrent également la voie à une réflexion plus large : pour lutter contre la désertification, il faut d’abord se demander pourquoi une région se désertifie. Ce n’est pas seulement une question de climat, mais aussi de gestion non-intégrée de l’eau et des terres, d’urbanisation non planifiée, d’absence de gouvernance participative, parmi tant d’autres facteurs.
Cette approche participative et inclusive se traduit par des initiatives adaptées au contexte local : ainsi, au Burkina Faso, la priorité est donnée à l’utilisation agricole des terres restaurées, tandis qu’au Niger, elles servent principalement de zones pastorales. Au Sénégal, les actions se concentrent davantage sur la mise en défens, qui permet de favoriser la régénération naturelle de la végétation et la conservation de la biodiversité.
Des résultats tangibles à l’échelle nationale
Les résultats du projet sont déjà palpables : au Burkina Faso, 3.000 hectares de terres initialement inutilisables ont été restaurés, permettant la reprise de cultures céréalières. En partenariat avec TreeAid, 28.000 arbres produisant des produits forestiers non ligneux* ont été plantés dans trois régions du Burkina Faso, et offriront une récolte durable et des opportunités de commercialisation.
Au Niger, un site de 500 hectares récupéré et doté d’un plan de gestion durable depuis 2023 est désormais une zone de pâturage productive pour les éleveurs locaux.
Au Sénégal, où les sols sont moins dégradés, la restauration repose entre autres sur la mise en défens de 500 hectares pour favoriser la reprise de la végétation. Cette approche assure la préservation des écosystèmes et permet aux habitant.e.s de gérer durablement leurs ressources naturelles.
Au Mali, où l’érosion des sols dans certaines zones représente une menace majeure pour les terres agricoles (mais également des infrastructures de base comme les écoles, maisons et centres de santé) la restauration des berges du fleuve Niger dans la commune de Meguetan permet de stabiliser les sols, de prévenir l’érosion des rives et d’améliorer la qualité des ressources en eau.
Dans les quatre pays, la formation et l’autonomisation des femmes et des jeunes sont au cœur des activités. Au travers d’un partenariat avec l’ONG Eclosio, nous soutenons par exemple près de 200 groupements féminins au Sénégal dans la valorisation des produits forestiers non ligneux : des formations sur la collecte durable, la transformation des produits et l’appui à la mise sur le marché permettent de soutenir ces femmes dans des activités génératrices de revenus climato-sensibles.
Un impact régional et une vision à long terme
Enabel contribue également à la mobilisation des financements climatiques et à l’amélioration de la gouvernance environnementale : un partenariat avec le Centre Régional Agrhymet, institution spécialisée du CILSS (le Comité permanent Inter-Etats de Lutte contre la Sécheresse dans le Sahel), permet de renforcer les capacités de cadres nationaux issus des ministères des quatre pays en matière de collecte et d’analyse des données sur la dégradation des terres. L’harmonisation des données et résultats figurant dans ces rapports nationaux est cruciale : elle permet non seulement aux pays d’analyser l’impact de leurs activités selon les standards internationaux, et de mieux défendre leurs intérêts sur la scène régionale et internationale.
Le programme climatique au Sahel s’inscrit dans l’initiative internationale de la Grande Muraille Verte et ambitionne de renforcer son positionnement lors de grandes conférences internationales à venir, comme le Sommet africain sur le climat et la COP30.
*Définition de PFNL : Les produits forestiers non ligneux sont des biens d’origine biologique autres que le bois, provenant des forêts, d’autres terrains boisés ou provenant d’arbres hors forêts (ex : fruits des arbres forestiers, fruits sauvages, plantes médicinales, champignons, résines, etc.) » (FAO, 1999).